L’AUTEUR ET LE VOLEUR.
Aux enfers un célèbre Auteur
Arrivait avec un Voleur.
La gloire du premier avait rempli le monde,
Et l’on vantait partout sa science profonde ;
Mais il avait caché dans des livres fameux
D’un venin corrupteur le charme insidieux.
Sous les dehors légers de la plaisanterie,
Attaquant de sang-froid la morale et les mœurs,
Son talent trop vanté prépara les malheurs
Qui devaient après lui désoler la patrie.
Son compagnon, le long du grand chemin.
Aurait peut-être aussi mérité quelque gloire.
Si du bourreau le lacet inhumain
N’avait trop brusquement terminé son histoire.
Le couple voyageur à peine est présenté
Par les Parques inexorables
Que son destin est arrêté :
Un regard de Minos a jugé les coupables.
À son terrible tribunal,
Sans rien dire, on connaît et le bien et le mal ;
Et chaque criminel voit dans sa conscience
Son procès tout écrit ainsi que sa sentence.
De là sont à jamais bannis les avocats
Et les discours et les débats.
Au bout de deux chaînes pesantes
Qu’elle accroche aux voûtes brûlantes,
- ↑ Traduite, ou plutôt imitée, ainsi que la suivante, du célèbre poète russe Kryloff.