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Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/48

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le bonheur. Un quart d’heure de voyage avec moi lui en montrera le chemin.

Eh ! que ne laisse-t-il à l’autre ces misérables soins, cette ambition qui le tourmente ? — Viens, pauvre malheureux ! fais un effort pour rompre ta prison, et, du haut du ciel où je vais te conduire, du milieu des orbes célestes et de l’empyrée, — regarde ta bête, lancée dans le monde, courir toute seule la carrière de la fortune et des honneurs ; vois avec quelle gravité elle marche parmi les hommes : la foule s’écarte avec respect, et, crois-moi, personne ne s’apercevra qu’elle est toute seule ; c’est le moindre souci de la cohue au milieu de laquelle elle se promène, de savoir si elle a une âme ou non, si elle pense ou non. — Mille femmes sentimentales l’aimeront à la fureur sans s’en apercevoir ; elle peut même s’élever, sans le secours de ton âme, à la plus haute faveur et à la plus grande fortune. — Enfin, je ne m’étonnerais nullement si, à notre retour de l’empyrée, ton âme, en rentrant chez elle, se trouvait dans la bête d’un grand seigneur.