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Page:Maistre Xavier de - Oeuvres completes, 1880.djvu/50

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aux sens par je ne sais quel lien secret ; en sorte que, sans se déranger de ses occupations, il peut prendre part aux jouissances paisibles de l’autre ; mais si ce plaisir augmente à un certain point, ou si elle est frappée par quelque spectacle inattendu, l’âme aussitôt reprend sa place avec la vitesse de l’éclair.

C’est ce qui m’arriva tandis que je nettoyais le portrait.

À mesure que le linge enlevait la poussière et faisait paraître des boucles de cheveux blonds, et la guirlande de roses dont ils sont couronnés, mon âme, depuis le soleil où elle s’était transportée, sentit un léger frémissement de plaisir et partagea sympathiquement la jouissance de mon cœur. Cette jouissance devint moins confuse et plus vive lorsque le linge, d’un seul coup, découvrit le front éclatant de cette charmante physionomie ; mon âme fut sur le point de quitter les cieux pour jouir du spectacle. Mais se fût-elle trouvée dans les Champs Élysées, eût-elle assisté à un concert de chérubins, elle n’y serait pas demeurée une demi-seconde, lorsque sa compagne, prenant toujours plus d’intérêt à son ouvrage, s’avisa de saisir une éponge mouillée qu’on lui présentait et de la passer tout à coup sur les sourcils et les yeux, — sur le nez, — sur