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Page:Maizeroy - Deux amies, 1885.djvu/243

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DEUX AMIES

— Heureusement qu’elles ne sont pas toutes ainsi ! dit en finissant M. de Guermandes, sans s’apercevoir que Jeanne haussait les épaules et les joues plus rouges, serrant de ses doigts qui tremblaient un peu la monture émaillée de sa lorgnette, regardait avidement le petit abbé, le détaillait d’un regard fouilleur, cherchait à se faire remarquer, à surprendre un de ses sourires équivoques.

Elle avait beaucoup réfléchi — et très froidement en pesant le pour et le contre — après le départ des Thiaucourt. Elle se sentait lasse de tourner dans le même cercle, de voir les mêmes figures, de se contenter des mêmes friandises, de revenir toujours à Mlle Moïnoff qui l’avait si effrontément bernée et torturée. Toutes ces amourettes de couvent, ces façons d’intrigues où l’on se défiait les unes des autres, où l’on sentimentalisait à tout propos, l’ennuyaient, la dégoûtaient presque de son vice. Elle rêvait de mener une existence à fond de train, accidentée, amusante qui l’emporterait avec des sensations pareilles à celles qu’elle éprouvait quand sa jument essayait de s’em-