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Page:Malatesta - Anarchy ; Morton - Is it all a dream, 1900.djvu/9

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sur cette idée préconçue, avouée ou non : les hommes ont des intérêts contraires et il faut une force extérieure et supérieure pour obliger les uns à respecter les intérêts des autres, en prescrivant et en imposant la règle de conduite qui fera s’harmoniser au mieux les intérêts en lutte et permettra à chacun de trouver le maximum possible de satisfaction avec le minimum possible de sacrifices.

Si les intérêts, les tendances, les désirs d’un individu sont en opposition avec ceux d’un autre individu ou, éventuellement, de la société tout entière, qui aura le droit et la force d’obliger l’un à respecter les intérêts de l’autre ? Qui pourra empêcher tel ou tel citoyen de violer la volonté générale ? La liberté de chacun a pour limite la liberté des autres ; mais qui fixera ces limites, et qui les fera respecter ? Les antagonismes naturels des intérêts et des passions rendent le gouvernement nécessaire et justifient l’autorité qui intervient dans la lutte sociale en tant que modératrice, et assigne les limites des droits et des devoirs de chacun. Voilà ce que disent le théoriciens de l’autoritarisme.

Ceci, pour la théorie. Mais pour être justes, les théories doivent être fondées sur les faits et les expliquer ; et on sait trop bien comment, en économie sociale, les théories sont trop souvent inventées pour justifier les faits, autrement dit pour défendre le privilège et le faire accepter sans histoire par ceux-là même qui en sont les victimes.

Tout au long de l’Histoire, tout comme à l’époque actuelle, le gouvernement est soit la domination brutale, violente, arbitraire d’un petit nombre sur les masses ; soit un instrument destiné à garantir leur domination et le privilège à ceux qui par force, ruse ou héritage, ont accaparé tous les moyens d’existence, dont la terre d’abord, et s’en servent pour tenir le peuple en esclavage et le faire travailler pour leur propre compte.

On opprime les hommes de deux façons : soit directement, par la force brutale, par la violence physique ; soit indirectement, en leur enlevant les moyens de subsistance et en les réduisant ainsi à discrétion. La première façon est à l’origine du pouvoir, c’est-à-dire du privilège politique ; et la seconde à l’origine de la propriété, c’est-à-dire du privilège économique. On peut aussi opprimer les hommes en agissant sur leur intelligence et sur leurs sentiments : c’est là le pouvoir religieux ou universitaire ;