Page:Malato - La Grande Grève.djvu/258

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s’élevaient maintenant dans les anciens faubourgs. Sur la côte des Mésanges, non loin de la maison Bardot, que Galfe avait jadis tenté de dynamiter, se dressait un grand bâtiment semblable à une caserne, et de fait, c’était une caserne religieuse, un ouvroir, où les bonnes sœurs de la Merci, une branche de la maison mère de Tondou, faisaient chrétiennement travailler douze heures par jour, des orphelines et veuves de mineurs en les nourrissant de soupe aux légumes et en leur payant un salaire dérisoire.

Cet ouvroir fournissait les magasins de lingerie et de confection tenus dans Mersey par des commerçants et des commerçantes, enrôlés dans les diverses confréries religieuses, et qui, en réalité, n’étaient que de simples prête-noms, agissant comme gérants pour le compte de l’Église.

Quelques commerçants indépendants avaient voulu lutter ; mais, écrasés par cette concurrence impossible à soutenir, ils s’étaient vus contraints, les uns après les autres, d’abandonner Mersey.

En face de l’église, où maintenant officiait l’abbé Carpion, successeur du curé Brenier, s’élevait un cercle catholique dont le président n’était autre que le maire de la ville. On y enrôlait la jeunesse bien pensante, représentée par les fils des agents de la Compagnie et un certain nombre de bourgeoisillons cherchant à se préparer des relations avantageuses ou un bon mariage par la protection du clergé. Une douzaine d’ouvriers, transfuges de leur classe, y figuraient le prolétariat domestiqué léchant les bottes de ses maîtres.

Le baron des Gourdes honorait assez souvent le cercle de sa présence. Par les éléments divers qui s’y trouvaient réunis, cette société pouvait arriver à exercer une influence sérieuse en temps d’élections et le successeur de Chamot avait hâte d’aller, au Palais-Bourbon, travailler au bonheur du peuple français, y compris ses esclaves.