Page:Malato - La Grande Grève.djvu/428

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retenir, sachant que la réunion se tiendrait près du Fier Lapin.

Un remous agita la foule. Ouvard, accompagné de Détras et de Bernard, sortait de la Ferme nouvelle. Les rangs s’entr’ouvrirent devant eux ; une chaise et une table apparurent au-dessus des têtes et, passées de mains en mains, disparurent au milieu de la foule.

Deux minutes plus tard, on vit le secrétaire du syndicat surgir dominant la multitude. Il avait placé la chaise sur la table et était monté sur cette chaise, que des camarades maintenaient en équilibre.

— Citoyens, camarades… commença-t-il.

— Silence ! crièrent les mineurs.

Le bourdonnement des conversations alla s’éteignant et, au bout d’un moment, un silence religieux se fit.

— Il ne suffit pas, continua Ouvard, de vous mettre en grève, lassés que vous êtes par toutes sortes de vexations. Il faut expliquer clairement pourquoi vous êtes en grève et ce que vous voulez.

— Oui ! oui ! clamèrent des milliers de voix, tandis que des applaudissements éclataient.

— Je vous en prie, camarades, poursuivit le secrétaire du syndicat, ne perdez pas de temps à applaudir, car la police prévenue certainement de notre meeting, la police, toute à la dévotion de la direction, peut chercher un conflit et il ne faut pas lui en fournir l’occasion. Nous avons le droit pour nous, gardons-le.

Malgré l’objurgation d’Ouvard, il y eut de nouveaux applaudissements. C’était forcé : le rythme des phrases, sonnant à l’oreille musicale des Latins, détermine chez ceux-ci, bien plus que la valeur raisonnée des mots, le réflexe tout mécanique qu’est le claquement de mains.

Cependant Ouvard donnait lecture du memorandum. Il avait achevé le premier paragraphe, recon-