Page:Malato - La Grande Grève.djvu/59

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tinuait à marcher. Où ? elle ne savait ! C’était le troupeau qui passe, suivant son guide ou l’impulsion qui lui a été donnée, jusqu’à ce que ce guide soit perdu ou la force acquise épuisée.

Les acolytes de Michet, ceux du moins qui se sentaient le plus soupçonnés, s’éclipsaient peu à peu ; mais il en demeurait encore quelques-uns, qui marchaient d’un pas ferme, en hommes qui savent où ils vont, et cela suffisait pour que les mineurs, emballés, suivissent.

Cependant Albert Détras, plus soupçonneux, avait demandé à un mineur, un vrai, de la première bande :

— Où allons-nous, camarade ?

— Je ne sais pas, répondit l’homme tout en continuant à marcher.

Un peu décontenancé par cette réponse, Albert s’adressa à un autre, un agent provocateur, cette fois. L’individu, embarrassé, se contenta de lui montrer l’horizon.

— Je te demande où l’on va, insista Détras avec un commencement d’irritation.

— Je vais où vous allez tous.

Et sur cette phrase ambiguë, le faux travailleur s’éloigna pour se perdre, l’instant d’après, dans la profondeur du bois.

— Halte ! s’écria Albert, l’esprit éclairé d’une lueur terrible.

Ronnot avait eu raison : c’était bien à un piège que l’on allait.

Maintenant tous ceux de la bande à Michet avaient disparu. Les mineurs, abandonnés à eux-mêmes, s’arrêtaient indécis devant le carrefour Sainte-Marie.

Une clairière de cent pas de circuit, ce carrefour où s’embranchaient les routes de Mersey à Saceny, Faillan et au bois des Brasses. Au croisement des trois chemins s’élevait une colonnette portant, dans une niche, une petite statue en plâtre de la Vierge