Page:Malato - La Grande Grève.djvu/77

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police allait lui-même réveiller l’employé du télégraphe ahuri et faisait transmettre aux autorités supérieures civiles et militaires, un télégramme circulaire donnant tous les détails de l’« insurrection » et les noms de ses prétendus chefs.

Immédiatement le commandant militaire du 8e corps montait dans un train spécial avec quatre cents hommes à destination de Mersey, où allait le rejoindre le préfet, à la tête d’une véritable armée de magistrats et de gendarmes.

Geneviève se dirigea vers le commissariat : un piquet d’infanterie le gardait ; la mairie, l’école, l’église, le télégraphe, la gare étaient pareillement occupés ou protégés. Dans les rues, quelques gamins commençaient à rôder, curieux ou hostiles, autour des soldats.

— Halte ! fit brusquement un sergent barrant le passage à la jeune femme.

Pourtant comme celle-ci, malgré l’insomnie et l’anxiété peintes sur son visage, était jolie, ce fut d’un ton moins rébarbatif qu’il ajouta :

— Que demandez-vous ?

— À voir M. le commissaire, répondit Geneviève.

— À pareille heure ! Fichtre ! vous êtes bien pressée !

— Mais monsieur, il faut absolument que je voie quelqu’un : mon mari a disparu.

— Il a eu bien tort, fit le sous-officier en lorgnant son interlocutrice avec cette impertinence du militaire bourreau des cœurs qui se prend pour don Juan lui-même et se croit partout en pays conquis.

— Je vous en prie, dit Geneviève, laissez-moi voir quelqu’un qui puisse me renseigner.

À ce moment déboucha d’un coin de rue un individu dont la vue fit bondir Geneviève : c’était le commissaire de police lui-même. Toute la nuit ce fonctionnaire avait été sur pied, interrogeant les mineurs