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Page:Malato - La Grande Grève.djvu/80

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Et, insensible au concert de lamentations qui redoublait, il entra dans le commissariat, tandis que les soldats, sur l’injonction de leur sous-officier, écartaient les malheureuses.


IX

RELIGION D’AMOUR.


Geneviève, une fois rentrée chez elle, ne prit même pas le soin de refermer sa porte et se livra tout entière à la douleur.

Durant que ses larmes coulaient, elle n’entendit pas entrer l’abbé Firot. Le prêtre la saisit à la taille comme pour la consoler.

— Vous ! s’exclama-t-elle en sortant alors de son désespoir.

— Oui, moi ! répondit-il avec un mélange d’onction et de tendresse. Pauvre femme ! je sais quelles sont vos douleurs et je viens vous consoler.

Et comme elle se taisait, encore étourdie par le choc de cette visite qui s’ajoutait à tant d’autres chocs, il reprit :

— Ne vous l’ai-je pas dit, ma chère enfant, la dernière fois que je vous ai vue, que je restais votre ami ? Et maintenant que vous voilà seule, le cœur saignant, sans appui, je viens à vous.

Ces paroles, débitées d’un ton sentimental, étaient parfaitement vraies. Oui, l’abbé Firot venait à Geneviève parce qu’elle demeurait isolée, accablée et sans défense ; toutefois, il n’avait pas trop à s’en vanter.

— Et vous, murmura Geneviève, que me voulez-vous ?

Dans ce « et vous » il y avait tout un reproche adressé à cet anonyme bourreau : la société ; la société dont le vicaire était une des forces malfaisantes.