Page:Malato - Révolution chrétienne et Révolution sociale, Savine, 1891.djvu/244

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voyait en Sibérie la courageuse révolutionnaire ; celle-ci, défendue par la foule, put échapper et gagner la Suisse, devenue le refuge ordinaire des nihilistes.

Le tzar Alexandre II fut l’objet de cinq attentats : le dernier, qui réussit, eut lieu le 13 mars 1881. L’autocrate revenait de passer une revue au manège Michel ; sa voiture s’avançait, escortée de cavaliers cosaques, au milieu des hourrahs de la foule. Casques, plumets, bonnets, chapeaux ondulaient sous le ciel gris ; des coiffures volaient en l’air, des mouchoirs s’agitaient devant le « père », le dieu de cette multitude fanatisée. De distance en distance, des policiers savamment échelonnés traversaient le flot humain. Une sécurité complète régnait dans les esprits : or, les deux voies conduisant du manège au palais : la Kleine-garten-strasse et le passage qui longe le canal Catherine étaient gardées par les conspirateurs.

La voiture impériale s’engagea sur le quai. Tout à coup, une jeune fille, Sophie Perowskaïa, donna le signal : une bombe, fendant l’air, vint éclater aux côtés d’Alexandre et tuer net un cosaque de l’escorte. Un cri immense partit de la foule : « Dieu soit loué ! je ne suis pas atteint, » fit le tzar tout pâle, en sautant à terre. Mais un autre conjuré, Elnikoff, lui répondit froidement : « Tu loues Dieu trop tôt, » et il lança un second projectile dont l’effet fut foudroyant. Elnikoff et l’empereur tombèrent, le premier mort, le second horriblement mutilé. Quelques heures plus tard, la Russie avaient changé de tyran.

Ryssakoff, Kibaltschick, Michaïleff, Scheliaboff,