Page:Malebranche - De la recherche de la vérité.djvu/536

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tourbillons s’environnent les uns les autres et se pressent inégalement, on verra encore clairement que leur équateur est une ligne courbe, irrégulière et qui peut approcher de l’ellipse.

Voilà les choses qui se présentent naturellement à l’esprit lorsque l’on considère avec attention ce qui doit arriver aux parties de l’étendue qui tendent sans cesse à se mouvoir en ligne droite ; c’est-à-dire, par le plus simple de tous les mouvements. Si l’on veut maintenant supposer une chose qui semble très-digne de la sagesse et de la puissance de Dieu, savoir : qu’il a formé tout d’un coup l’univers dans le même état, que ses parties se seraient arrangées avec le temps, selon les voies les plus simples, et qu’il les conserve aussi par les mêmes lois naturelles ; en un mot, si l’on veut faire application de nos pensées avec les objets que nous voyons : on pourra juger que le soleil est le centre du tourbillon ; que la lumière corporelle qu’il répand de tous côtés n’est autre chose que l’effort continuel des petites boules qui tendent à s’éloigner du centre du tourbillon ; et que cette lumière doit se communiquer en un instant par des espaces immenses, parce que tout étant piein de ces boules on ne peut en presser une qu’on ne presse toutes les autres qui lui sont opposées.

On pourra encore déduire de ce que je viens de dire plusieurs autres conséquences ; car les principes les plus simples sont les plus féconds, pour expliquer les ouvrages de celui qui agit toujours selon les voies les plus simples. Mais on a besoin de considérer encore certaines choses qui doivent arriver à la matière. Nous devons donc penser qu’il y a plusieurs tourbillons semblables à celui que nous venons de décrire en peu de paroles : que les centres de ces tourbillons sont les étoiles, lesquelles sont autant de soleils : que les tourbillons s’environnent les uns les autres, et qu’ils sont rangés de telle manière, qu’ils se nuisent le moins qu’il se peut dans leurs mouvements, mais que les choses n’ont pu en venir là que les plus faibles des tourbillons n’aient été entraînés et comme engloutis par les plus forts.

Pour comprendre ceci, il n’y a qu’à penser que le premier élément qui est dans le centre d’un tourbillon, peut s’échapper et s’échappe sans cesse par les intervalles des boules, vers la circonférence du même tourbillon ; et que dans le temps que ce centre ou cette étoile se vide par son équateur, il doit y rentrer d’autre premier élément par ses pôles : car cette étoile ne se peut vider d’un côte qu’elle ne se remplisse de l’autre, puisqu’il n’y a point de vide dans le monde comme je le suppose ici, et qu’il est facile de le prouver par les effets naturels, par la transmission, par exemple,