Page:Malebranche - De la recherche de la vérité.djvu/598

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plusieurs autres choses absolument nécessaires à la connaissance de la physique. Au lieu que, si l’on voulait raisonner dans cette question par suppositions, afin de remonter ainsi jusques aux premières causes et jusques aux lois de la nature selon lesquelles toutes choses se forment, on ferait beaucoup de fausses suppositions qui ne serviraient à rien.

On pourrait bien reconnaître que la cause de la fermentation est le mouvement d’une matière invisible qui se communique aux parties de celle qui s’agite ; car on sait assez que le feu et les différentes fermentations des corps consistent dans leur agitation, et que, par les lois de la nature, les corps ne reçoivent immédiatement leur mouvement que par la rencontre de quelques autres plus agités. Ainsi on pourrait découvrir qu’il y a une matière invisible dont l’agitation se communique par la fermentation aux corps visibles. Mais il serait moralement impossible, par la voie des suppositions, de découvrir comment cela se fait ; et il n’est pas de beaucoup si difficile de le découvrir lorsqu’on examine la formation des éléments ou des corps, dont il y a un plus grand nombre de même nature, comme on le peut voir en partie par le système de M. Descartes.

La troisième partie de la question, qui est des mouvements convulsifs, ne sera pas extrêmement difficile à résoudre, pourvu que l’on suppose qu’il y a dans le corps des esprits animaux capables de quelque fermentation et des humeurs assez pénétrantes pour s’insinuer dans les pores des nerfs par où les esprits se répandent dans les muscles, pourvu aussi que l’on ne prétende point déterminer quelle est la véritable disposition des parties invisibles qui contribuent à ces mouvements convulsifs.

Lorsque l’on a séparé un muscle du reste du corps, et qu’on le tient par les extrémités, on voit sensiblement qu’il fait effort pour se raccourcir lorsqu’on le pique par le ventre. Il y a de l’apparence que ceci dépend de la construction des parties ímperceptibles qui le composent, lesquelles, comme autant de ressorts, sont déterminées à de certains mouvements par celui de la piqûre. Mais qui pourrait s’assurer d’avoir trouvé la véritable disposition des parties qui servent à produire ce mouvement, et qui pourrait en donner une démonstration incontestable ? Certainement cela paraît impossible, quoique peut-être, à force d’y penser, l’on puisse imaginer une construction de muscles propres à faire tous les mouvements dont nous les voyons capables. Il ne faut donc point penser à déterminer quelle est la véritable construction des muscles. Mais, parce qu’on ne peut raisonnablement douter qu’il n’y ait des esprit sus-