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Page:Malherbe - Œuvres poétiques de Malherbe, éd. Blanchemain, 1897.djvu/289

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CHANSONS.

J’ay beau m’épuiser les veines,
Et tout mon sang en larmes convertir ;
Un mal au deçà du trépas,
Tant soit-il extrême, ne vous émeut pas.

Je sçay que c’est : vous estes offensée,
Comme d’un crime hors de raison,
Que mon ardeur insensée
En. trop haut lieu borne sa guérison ;
Et voudriez bien, pour la finir,
M’oster l’esperance de rien obtenir.

Vous vous trompez : c’est aux foibles courages,
Qui tousjours portent la peur au sein.
De succomber aux orages,
Et se lasser d’un pénible dessein.
De moy, plus je suis combattu,
Plus ma résistance monstre sa vertu.

Loin de mon front soient ces palmes communes
Où tout le monde peut aspirer ;
Loin les vulgaires fortunes
Où ce n’est qu’un, jouir et désirer.
Mon goust cherche l’empeschement
Quand j’aime sans peine, j’aime laschement.

Je cognois bien que, dans ce labyrinthe,
Le Ciel injuste m’a réservé