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ODE VIII

Ce n’est point aux rives d’un fleuve
Où dorment les vents et les eaux
Que fait sa veritable preuve
L’art de conduire les vaisseaux ;
Il faut, en la plaine salée,
Avoir lutté contre Malée,
Et prés du naufrage dernier
S’estre vu dessous les Pléiades,
Eloigné de ports et de rades,
Pour estre creu bon marinier.

Ainsi, quand la Grece, partie
D’où le mol Anaure couloit,
Traversa les mers de Scithie
En la navire qui parloit,
Pour avoir sceu des Cyanées
Tromper les vagues forcenées,
Les pilotes du fils d’Eson,
Dont le nom jamais ne s’efface,
Ont gaigné la premiere place
En la fable de la Toison.

Ainsi, conservant cet empire
Ou l’infidélité du sort,
Jointe à la nostre, encore pire,
Alloít faire un dernier effort,
Ma Reine acquiert à ses merites
Un nom qui n’a point de limites,