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XXX
NOTICE

« gros » Marc-Antoine de Gérard, sieur de Saint-Amand, « roi des goinfres. »

Il est né en 1594, près de Rouen. Fils d’un armateur qui a commandé jadis, sous Élisabeth, une escadre anglaise, et qui finira maître-verrier, Marc-Antoine fera beaucoup plus de métiers encore que son père, et saura beaucoup plus de choses. Il reste verrier, mais il est aussi poète, et peintre, et excellent joueur de luth, et soldat, et diplomate. Grand voyageur enfin, dans sa jeunesse, il a poussé jusqu’en Amérique. À vingt-cinq ans, par la protection du duc de Retz, qu’il a suivi dans son gouvernement de Belle-Isle en Mer, il a été nommé Commissaire de l’Artillerie. Un peu plus tard, il accompagne à Rome le Maréchal de Créqui. En 1636, le Comte d’Harcourt, — celui que dans les tripots et les cabarets on appelle « Cadet-la-Perle » mais en qui Richelieu a deviné un brave — ayant été mis à la tête d’une escadre, Saint-Amand s’embarque avec lui en qualité de Commandant d’un vaisseau du roi ; et voilà nos deux anciens compagnons de jeu et de beuveries qui se couvrent de gloire en s’emparant des îles de Lérins, puis de la Ville d’Orestani en Sardaigne. Après, ils font ensemble la campagne de Piémont, se battent sous Cazal et livrent bataille à Ivrée, où le Cardinal de Savoie est vaincu (1641). Deux ans plus tard, notre poète est en Angleterre, car le Comte d’Harcourt y a été envoyé pour proposer la médiation de la France entre Charles Ier et le Parlement. De 1649 à 1651, au risque de devenir « le gros Saintamantski, » le voilà gentilhomme de la Chambre auprès de Marie de Gonzague, reine de Pologne, à laquelle il dédie son idylle héroïque de Moïse Sauvé. Une autre fois, c’est chez la reine Christine de Suède, à Stockolm, qu’il ira passer un hiver, toujours choyé, toujours applaudi, toujours aimé. Entre-temps, il revient à Paris, où il se partage de nouveau entre les tavernes, les brelans et l’Académie. Car l’Académie ne lui a pas tenu rigueur de sa vie débraillée : on l’y a même dispensé du discours d’usage, à condition qu’il voulut bien, dans la confection du dictionnaire, se charger des mots burlesques. Il meurt en 1661, âgé de soixante-sept ans.

Son œuvre est très mêlée ; il s’y trouve du meilleur et