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FRANÇOIS DE MALHERBE

Au Roi Henri le Grand

JE le connais, Destins, vous avez arrêté
Qu’aux deux fils de mon roi se partage la terre,
Et qu’après le trépas ce miracle de guerre
Soit encore effroyable en sa postérité.

Leur courage aussi grand que leur prospérité
Tous les forts orgueilleux brisera comme verre ;
Et qui de leurs combats attendra le tonnerre
Aura le châtiment de sa témérité.

Le cercle imaginé qui de même intervalle
Du Nord et du Midi les distances égale,
De pareille grandeur bornera leur pouvoir :

Mais étant fils d’un père où tant de gloire abonde,
Pardonnez-moi, Destins, quoi qu’ils puissent avoir,
Vous ne leur donnez rien s’ils n’ont chacun un monde.


Pour la Vicomtesse d’Auchy

IL n’est rien de si beau comme Caliste est belle ;
C’est une œuvre où nature a fait tous ses efforts ;
Et notre âge est ingrat qui voit tant de trésors,
S’il n’élève à sa gloire une marque éternelle.

La clarté de son teint n’est pas chose mortelle :
Le baume est dans sa bouche, et les roses dehors ;
Sa parole et sa voix ressuscitent les morts,
Et l’art n’égale point sa douceur naturelle.

La blancheur de sa gorge éblouit les regards ;
Amour est en ses yeux, il y trempe ses dards,
Et la fait reconnaître un miracle visible.