Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/1441

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Glatigny avait, on le sait, un goût marqué pour la poésie érotique ou gaillarde et avait déjà fourni trois pièces au Parnasse | Satirique | du Dix-neuvième siècle, | recueil de vers piquants et gaillards | Rome. | A l'enseigne des Sept péchés capitaux | s. d. (1864) où l’on trouvait des pièces de Hugo, Musset, Béranger, Émile Deschamps, Auguste Barbier, Banville, Monselet, etc... et dont le Nouveau Parnasse Satyrique ne fut, en somme, qu’un supplément. Glatigny avait précisément passé un mois chez Mallarmé, à Tournon, en avril-mai 1864 : et l’on sait que c’est lui qui, devenu l’année suivante rédacteur en chef de la Semaine de Cusset et de Vichy, y publia les deux premiers poëmes en prose de Mallarmé. Voici le texte du poëme tel qu’il figure, à la fois dans le manuscrit auquel nous avons fait, plus haut, allusion, et dans le Nouveau Parnasse Satyrique. IMAGE GROTESQUE (Les Lèvres roses) Une négresse, par le démon secouée, Veut goûter une triste enfant aux fruits nouveaux, Criminelle innocente en sa robe trouée, Et la goinfre s'apprête à de rusés travaux. Sur son ventre elle allonge en bête ses tétines, Heureuse d'être nue, et s’acharne à saisir Ses deux pieds écartés en l’air dans ses bottines, Dont l’indécente vue augmente son plaisir ; Puis, près de la chair blanche aux maigreurs de gage lie. Qui tremble, sur le dos, comme un fol éléphant, Renversée, elle attend et s’admire arec gèle, En riant de ses dents naïves à l'enfant ; Et dans ses jambes quand la victime se couche, Devant une peau mire ouverte sous le crin, Avance le palais de cette infâme bouche Pâle et rose comme un coquillage marin. Un autre manuscrit autographe de la même pièce présente quatre très légères variantes : dans des bottines, au lieu de « dans ses bottines » ; s’obstine au lieu de « s’acharne » ; ajoute à son plaisir au lieu de « augmente son plaisir » et Tout près... au début du troisième quatrain. (Coll. II. M.) Ce texte diffère assez grandement de celui que Mallarmé publia par la suite, dans l’édition fac-similé de ses Poésies, en 1887 et qui figure dans la nôtre. En fait, cinq vers seulement sur quatorze y ont été conservés dans leur leçon première. Ce poëme ne figure pas dans l’édition des Poésies de Stéphane Mallarmé (Deman, 1899), préparée et disposée par le poëte lui-