Aller au contenu

Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/1534

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

« L’été qui brûle, la Seine qui coule, la somptueuse foret de Fontainebleau, et, non loin de la berge, la grange bourrée de paille et de foin. Au-dessus, par un escalier-perchoir aux poules, la vaste salle en torchis, ex-atelier du peintre de Neuville, comme signé au mur d’un écrasement de pinceau, en flaque brune de sang. « Cet atelier ! La scène surélevée, chef-d’œuvre d’un charpentier rustique, ses décors de paravents verdâtres, sa rampe en fer-blanc, son rideau de draps de lit; pour machiniste la vieille Julie, notre servante d’avant la guerre; les costumes taillés dans le velours usé et la satinette, ou achetés au Temple, sans souci de la gale ou des puces... Une troupe de trois, quatre personnes au plus, dont notre ami, le poëte Jean-Marie Mestrallet. L’ctoilc : Mlle Geneviève Mallarmé, notre cousine. « A si peu, que pouvait-on jouer ? Quoi ? Mais tout, absolument. Des pièces où le vers tintait en grelot d’or... Des farces... Des pantomimes. Des commedias dell’arte... « Le public ? « Les villageois des environs, une foule bourdonnante : le dimanche soir, nos affiches, collées au pont de Valvins, l’attiraient de Samoreau, d’Héricy, de Vulaincs, qui apportant sa chaise, qui un banc. « ... Et nous avions Stéphane Mallarmé pour metteur en scène et poëte. « Nul n’indiqua mieux à Nérinc, à Sylvia, à Guillemettc, à Gysette, à Dona Sol, à Colombinc, à celle qui, enfant et femme, fut toutes celles-là et d’autres encore, à sa fille Geneviève, comédienne ingénue et gracieuse, le geste et l’intonation d’une scène, le style d’un couplet. « Car Stéphane Mallarmé en tout portait la grâce et la mesure, et cette distinction qui vient de l’âme. « Sur notre prière, il écrivait de délicats prologues, tel ce sonnet qui inaugura la scène de Valvins, après quelques coups d’archct. » Et Paul Margueritte publiait, pour la première fois, au cours de ces souvenirs, ce sonnet d’ouverture, tel qu’il apparaît dans notre édition, et les triolets que l’on trouve un peu plus loin, dans un ordre différent de celui que nous avons adopté d’après la copie qui figure dans un des carnets de Geneviève Mallarmé. Du sonnet d’ouverture, une copie manuscrite (coll. Bonniot) présente ces variantes : Vers 2 : Eux-mêmes non moins gais que le riche tableau Vers 3 : De beaux comédiens... Vers 4 : Apportent la folie... Vers 5 : Aucun logis trop nu... Vers 6 : Ils pensent le changer Vers 7 : Pour peu qu'au vierge pli marqué par le rideau. Paul Margueritte ajoute : « Le théâtre de Valvins dura deux étés. » Les dates, 1881-1882, figurent dans l’édition de 1920 des