Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/301

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de m’admettre à son repas supérieur, partagé vite avec quelque aîné fameux jailli contre une proche toile en train des tours de force et banalités alliables au jour. Nu, de pirouetter dans sa prestesse de maillot à mon avis surprenante, lui, qui d’ailleurs commença : « Tes parents ? — Je n’en ai pas. — Allons, si tu savais comme c’est farce, un père... même l’autre semaine que bouda la soupe, il faisait des grimaces aussi belles, quand le maître lançait les claques et les coups de pied. Mon cher ! » et de triompher en élevant à moi la jambe avec aisance glorieuse, « il nous épate, papa », puis de mordre au régal chaste du très jeune : « Ta maman, tu n’en as pas, peut-être, que tu es seul ? la mienne mange de la filasse et le monde bat des mains. Tu ne sais rien, des parents sont des gens drôles, qui font rire. » La parade s’exaltait, il partit : moi, je soupirai, déçu tout à coup de n’avoir pas de parents. LA DÉCLARATION FORAINE Le Silence ! il est certain qu’à mon côté, ainsi que songes, étendue dans un bercement de promenade sous les roues assoupissant l’interjection de fleurs, toute femme, et j’en sais une qui voit clair ici, m’exempte de l’effort à proférer un vocable : la complimenter haut de quelque interrogatrice toilette, offre de soi presque à l’homme en faveur de qui s’achève l’après-midi, ne pouvant à l’encontre de tout ce rapprochement fortuit, que suggérer la distance sur ses traits aboutie à une fossette de spirituel sourire. Ainsi ne consent la réalité; car ce fut impitoyablement, hors du rayon qu’on sentait avec luxe expirer aux vernis du landau, comme une vocifération, parmi trop de tacite félicité pour une tombée de jour sur la banlieue, avec orage, dans tous sens à la fois et sans motif, du rire strident ordinaire des choses et de leur cuivrerie triomphale : au fait, la cacophonie à l’ouïe de quiconque, un instant écarté, plutôt qu’il ne s’y fond, auprès de son idée, reste à vif devant la hantise de l’existence.