Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/453

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quelqu'un ambigu », et se transmue elle-même, en quoi — en constellation. Voilà, si l'on peut dire, selon des contours nets, trop nets, esquissé le « progrès du personnage » qui se confond avec le développement de la maîtrise du Toëte, équation poignante par quoi on évalue toute la conquête de soi qu'il nous a léguée. D'ailleurs les attributs du Héros, grâce auxquels il nous permet le contact, sont analogues sinon identiques. Le volume ordonnateur du grimoire et la lumière dispensatrice de clarté se sont unis et diaphanéisés en un seul élément, la plume « plume solitaire éperdue — rythmique suspens du sinistre ». — Le Héros évolue dans une ambiance semblable, c'est le Temps, le Minuit fatidique, renaissant dans « une toque de minuit » — mêmes hésitations marquées dans l'un par l'indéfini de la spirale de l'escalier et l'opposition des parois d'ombre des portes du tombeau, dans l'autre par la « voile alternative » du bâtiment « penché de l'un ou l'autre bord », et cette sirène aux « squames ultimes bifurquées ». Lui-même ne surgit pas devant nous du vague, il est entouré de comparses {style de théâtre), dans Igitur la commémoration d'une race antérieure, de ses ancêtres, aboutissement qu'il est de leurs vains efforts — idée qui se retrouve dans le Coup de Dés « sans nef... vaine ancestralement à n'ouvrir pas la main crispée... » tandis que « l'ultérieur démon immémorial » a « induit le vieillard vers cette conjonction suprême avec la probabilité ». IPifin l'idée de Folie, folie de défier le destin, résidu inconscient des travaux et des aspirations de toute sa race et que lui, conscient, reprend « Folie utile » transposée dans le Coup de Dés par sa lutte avec l'élément, la mer : « le voile d'illusions rejailli leur hantise... chancellera, s'affalera, folie, n’aboi.ira », folie qui le mène à l'acte suprême de jeter les dés. Je supplie le lecteur de ne point voir dans ces lignes une tentative d'explication. On n'explique pas Mallarmé, on le sent et on l'aime. J'ai voulu simplement, poursuivant un parallèle qui s'imposait, montrer l'unité admirable de sa vie. La publication clé cet ouvrage suppléera peut-être, clans quelque mesure, du moins quant à l'évolution plénière de ce rare esprit, à la réalisation de son Grand Œuvre inachevé. Là me semble résider l'intérêt primordial de cette exhumation à laquelle il y a lieu de croire que la postérité ne restera pas indifférente. Des amis d'ailleurs, élus par lui, auxquels il était très attaché,