Page:Mallarmé - Œuvres complètes, 1951.djvu/768

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sont comme la dernière touche posée par le goût. Commençons par ces ornemcnts-là, ne serait-ce que pour en finir avec eux! Que de fantaisies ont vu le jour avant et pendant cette Quinzaine, surtout les ravissantes Lavallières à boutons de rose brochés couleur sur couleur, et d’autres écossaises avec toutes les nuances voulues, et celles à rayures satinées : les bleus pâles et les roses, enfin, adorables. Je décerne un non moindre éloge à de charmantes petites parures en turquoise, ce sont des Cravates et des Nœuds de cheveux, composées de deux tons ou de deux nuances, comme capucine et soufre, bleu et vert, rose et bleu, gris perle et rose, acier bleuté et gris de fer, ete.; tout cela avec guipure et Valenciennes. Quant aux Mouchoirs microscopiques faits pour les plus petites des mains, j’en vois plusieurs, dont un hanneton brodé en couleur occupe l’un des coins portant deux lettres entrelacées rose et bleu ou rouge et bronze, ce qui est, au moins, original. Certains ont leur lettre brodée en laine verte et rouge : ceux à large ourlet en foulard gris perle sont d’un grand cachet, plus même peut-ctrc que ceux tout en foulard rose ou bleu avec des plissés en pareil, des entredeux et de la dentelle encore de Valenciennes. Mais toutes ces Fantaisies de bientôt familières à plusieurs d’entre nous s’effacent devant une restée la parure indiscutable de l’heure, après l’avoir été de la saison; que rien, ni les mois employés à regarder la mer, n’ont fait passer de mode, ni les semaines occupées déjà à chasser sur les terres (et moins celles-ci que ceux-là, puisqu’à l’appellation vague de Collier-bagatelle, le sort malin qui préside à la destinée de cet objet s’obstine à opposer l’appellation cynégétique de Collier-de-chien). Qu’est-ce ? Je le dis simplement pour le dire : un petit ruban en velours noir qui, derrière le cou dont il fait le tour, s’attache par une boucle carrée, dans laquelle il passe et tombe. Mille lettres en diamant étincellent avee l’éclat captivant d’un secret qui se montre et ne se livre pas : prénoms et noms entrelacés de celle qui porte le collier et de celui qui a fait don. La légende est qu’un seul bijoutier fait ces colliers et varie leur mystère; or, donner son adresse serait, même entre femmes, un acte de haute trahison : inutile, car ce n’est d’abord pas à nous de les acheter. J’ajouterai, toutefois, pour celles de mes lectrices qui voudraient prévenir les hasards d’un cadeau par la manifestation particulière de leur goût, qu’il se fait de ces parures en pierreries de couleurs et en perles, ou encore avec petite frange de diamants. Des boucles d’oreilles même se portent de ruban de velours avec les initiales seules répétées en travers. Londres, Vienne, Pétcrsbourg et New-York, sont instruits; et cet affiquet presque classique me ramène aux