Page:Mallarmé - Les Dieux antiques.djvu/138

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fils de Zeus, ainsi que dans notre mot " « serpent »", ce qui rampe. Maintenant comment l’idée de Saramâ, ou l’Aurore, nous conduit-elle à celle du Hermès grec ? Dans les hymnes, Saramâ, cherchant les vaches, traverse, dit-on, le ciel avec une brise légère. Elle représente le matin et la douce haleine des vents d’été, chuchotant çà et là, tandis qu’elle se meut, puis avance. Dans l’esprit des Grecs, cette idée de la brise remplaça graduellement l’idée du matin, et c’est ainsi qu’Hermès vint à représenter le vent ou l’air en mouvement. Ne voyez-vous pas que cela explique l’histoire d’Hermès jusque dans ses moindres traits ? Le vent, qui chuchote doucement lors de ses premiers commencements, peut fraîchir en brise de mer, avant d’être âgé d’une heure, et balayer devant lui les nuages gros d’une pluie qui renouvellera la terre. Il fouille, invisible, dans les trous et les fissures, il tournoie dans les coins obscurs, il plonge dans les antres et les cavernes ; et quand les gens sortent pour voir quels méfaits il a commis, ils entendent son rire moqueur, alors il se hâte par voies et par chemins. L’esprit et l’humour de ce conte sont fort anciens : il se trouva, si l’on veut, tout fait entre les mains des poètes grecs (mais on peut en dire autant de tout ce que l’homme a jamais inventé). Nous découvrons simplement ce qui existe : encore faut-il chercher patiemment et sincèrement. Or le charme du conte d’Hermès ressort de l’examen, fait avec soin par les poètes, de l’action variable du vent.

Quelqu’un, dans la légende antique, mérite également qu’on dise de lui qu’il a, le premier, donné le feu aux hommes, Prométhée, et aussi Phoronée {mais Phoronée, le Bhuranyu indien, n’est qu’un simple nom du feu).