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Page:Mallarmé - Les Dieux antiques.djvu/226

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que Bellérophon avait pris buvant à la fontaine de Piréne.

Autres hauts faits : il vainquit les Solymes et les Amazones (fig. 151), et épousa ensuite la fille d’Iobatès, après quoi il essaya de s’élever au ciel sur Pégase ; mais Zeus envoya un taon qui piqua le cheval et lui fit jeter bas son cavalier. Bellérophon ne se tua pas sur-le-champ, mais ses forces furent brisées, et il mourut après avoir erré seul, pendant quelque temps, dans la plaine aléienne. Voyons ! se souvient-on de quelque autre histoire à laquelle ressemble celle-ci ? Les tâches imposées à Bellérophon répondent exactement aux travaux d’Héraclès, de Persée, de Thésée, et à ceux d’autres héros. L’amour d’Anté qu’il repousse, c’est le délaissement de Brunehilde par Sigurd, ou d’Œnone par Pâris. Après avoir tué la Chimère, il gagne son épouse, comme Œdipe gagne Jocaste après avoir conquis le Sphinx, et Persée se marie à Andromède après avoir tué le dragon libyen. La tentative de voler au ciel est la tentative faite par Phaéton de conduire le char d’Hélios, et celle faite par Ixion de posséder Héré. Le taon qui pique Pégase reparaît dans l’histoire d’Io. La chute de Bellérophon est la descente rapide du soleil vers le soir ; et la plaine aléienne représente cette vaste diffusion de lumière sombre à travers laquelle on voit quelquefois voyager le soleil, taciturne et solitaire, à son coucher.

Les détails abondent en la mémoire du lecteur et se relient tous en son esprit, au point où nous en sommes de notre étude générale ; cela, on le voit, à propos du moindre cas, le présent, par exemple.