Page:Mallarmé - Notes sur le théâtre.djvu/47

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duction du trait fortuit suffisante pour qu’on les revoie déjà et à jamais éclairés d’un jour populaire qui s’impose, immédiat, sans la préparation d’absurdes et lentes pratiques. Comme c’est neuf, dépendant d’un parfait concept, en même temps qu’approprié à un sens du plaisir d’à présent qui juge la salle de spectacle des heures durant une géhenne. Quelque soir, un bref morceau admirable de touche naïve, forte ainsi nous poigne et rien qu’à paraître illumine, suggère et tranche, toute une technique. Le spectacle bien instructif que c’était, du reste ; où, avec deux saynètes âpres et jeunes, j’éprouvai la satisfaction, applaudissant un très pince sans rire canevas du connaisseur spécial en pantins de bois et autres, Duranty, poussé dans le sens voulu de froide furie et réduit par M. Paul Alexis, une fois par excellence et la centième de vérifier l’étonnant à propos d’un usage relevant du tréteau, honoré par Shakespeare et retrouvable dans les seuls cafés-concerts. À savoir que les rôles féminins, comme ici d’une rêche et folâtre demoiselle malaisée à marier, ou de gaillardes et ceux des vieilles surtout, gagnent à paradoxalement être joués par l’homme : ils écartent ainsi l’irrévérence puis prêtent à un cas trop rare où persiste chez nous l’impression d’étrangeté et de certain malaise qui ne doit jamais, quant à une esthétique primitive et saine, cesser tout à fait devant le déguisement, indice du théàtre, ou Masque.

Stéphane Mallarmé