anglais, qu’il sembla que Clive serait pour la première fois obligé de se retirer. Mais, au moyen d’un de ses officiers qui savait le français, il réussit, au moment où tout était désespéré, à tromper les sentinelles, et à amener ainsi une force considérable derrière le camp. Une décharge soudaine surprit tellement les Français, qu’ils s’enfuirent, abandonnant leur position et leurs canons. Beaucoup furent faits prisonniers, et cet artifice changea une défaite imminente en une victoire, la plus grande jusqu’ici ; nouvelle preuve, s’il en était besoin, que la valeur et les fortes positions sont impuissantes devant l’attaque d’un bon général, si elles n’en ont également un pour les défendre.
Du lieu témoin de sa victoire, Clive marcha sur Arcate, et de là dans la direction de Vellore. Pendant qu’il méditait la prise de cette ville, occupée par Mortiz-Ali au nom de Chunda-Sahib, il reçut l’ordre de retourner immédiatement au fort Saint-David, afin de prendre d’urgence des mesures pour la délivrance de Trichinopoly, dont la garnison souffrait beau’oup du blocus persistant de Law. Dans sa route, il passa par le lieu où M. de la Touche avait été victorieux de Nazir-Jung et où la ville naissante de Dupleix-Futteh-Abad[1] commençait à s’élever. Clive, laissant pour un moment sa haine contre l’illustre français dominer ses instincts généreux, rasa la ville jusqu’à ses fondements. Il se rendit ensuite rapidement à Saint-David. Là, il reconnut que le Gouverneur n’avait négligé aucun des préparatifs nécessaires à la prochaine expédition. Il y avait mis tant d^activité, qu’au bout de trois jours Clive fut prêt à s’avancer vers Trichinopoly.
On était alors au 25 mars 1752. Le lendemain vit paraître sur les rivages indiens un vétéran éprouvé, le major Lawrence, dont l’arrivée eut pour conséquence un retard de deux jours et quelques modifications dans l’organisation des affaires. Enfin, le 28, tout était prêt : un corps composé de quatre cents Européens et de onze
- ↑ M. Orme parle de cette ville comme ayant été fondée pour rappeler le souvenir de l’acte détestable de la mort de Nazir-Jung. Les préjugés et les passions du temps ont pu disposer les contemporains anglais à parler ainsi, mais ce jugement est inexact. La ville fut bâtie pour perpétuer le souvenir du triomphe de la politique de Dupleix, porté à son comble par la victoire de M. de la Touche. La mort de Nazir-Jung est un des incidents de cette victoire, mais les Français n’en étaient pas responsables.