De son côté, Conflans agit comme pour faciliter les plans des Anglais : au lieu de marcher rapidement sur Vizagapatam, de vaincre la rébellion dès son début et avant que les rebelles eussent pu recevoir aucun secours, il se contenta d’adresser des demandes réitérées à Lally, et marcha sans se presser sur Rajamundry. Il occupa la ville et était encore campé sur la rive Nord de la rivière du même nom, quand il fut informé que les troupes anglaises avaient débarqué à Vizagapatam le 12 octobre. Une pareille nouvelle n’aurait pas dû lui causer de grandes alarmes, car il avait sous son commandement les troupes les mieux acclimatées et les mieux disciplinées de toutes celles qui avaient servi la Compagnie française dans l’Inde méridionale. C’étaient ces mêmes hommes qui avaient vu se disperser devant eux la célèbre cavalerie mahratte, et qui, depuis moins d’un an, avaient su se frayer une route au milieu de populations hostiles, pour aller secourir Bussy à Hydérabad. Ils n’avaient jamais tourné le dos à l’ennemi, et l’on pouvait compter sur eux. Avec de tels hommes, un chef capable pouvait défendre les provinces contre des forces plus importantes que celles qui les menaçaient ; dans ces circonstances, et appuyé d’ailleurs par deux mille Cipayes et un grand nombre de princes indigènes, le devoir de Conflans était d’avancer et de donner ainsi à ses hommes cet esprit de confiance qu’inspire toujours la marche en avant, et qui se serait communiqué certainement à ses alliés indigènes. Il est d’autant plus étrange qu’il n’ait pas agi ainsi, qu’il sut que le colonel Forde n’avait que des troupes neuves à lui opposer, et qu’il eût été sage d’attaquer. Il préféra adopter une tactique qui, dans l’Inde, n’a jamais eu de succès et qui consiste à attendre l’attaque de l’ennemi dans une position qu’on a choisie. Il établit ses troupes au village de Condore, à quarante milles au Nord de Rajamundry. C’est près de ce lieu qu’il fut rencontré, le 8 décembre, par le colonel Forde, qui l’attira hors de sa position, l’en isola et le défit complètement ; il perdit son camp, ses canons et quelques hommes ; il s’enfuit à cheval, et arriva le soir à Mazulipatam[1]. Forde, poursuivant sa victoire, occupa Rajamundry le 10
- ↑ Le récit détaillé de ce fait d’armes, aussi brillant que bien réussi pour les Anglais, se trouve dans The History of the Bengal Army, par le colonel Broome, ouvrage qui