Page:Malo - Une muse et sa mere.pdf/205

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Sophie Gay commença à pratiquer le métier d’auteur lorsque son mari perdit sa situation de receveur général. Maintenant qu’il n’est plus là, elle compte plus que jamais sur sa littérature pour alimenter son budget, et elle s’y livre entièrement. Mais bien vite elle comprend que le génie lui fait défaut. Elle n’est pas la seule. Ses romans et ses romances n’en connaissent pas moins la vogue ; par contre, à part l’opéra-comique, son théâtre ne lui ménage pas de triomphes éclatants, bien loin de là. Ce n’est pas par ses propres moyens qu’elle parvien dra à se maintenir au niveau de cette existence parisienne qu’elle mène depuis le temps du Direc toire, qui donne pâture à sa passion des choses de l’esprit, à son besoin de bruit et d’éclat, à son désir de voir et d’être vue, à son ardente curiosité de toute nouveauté intellectuelle ou artistique.

La célébrité conquise du jour au lendemain par Delphine lui montre la voie. Ce qui lui manque pour acquérir la gloire et la situation qu’elle convoite, elle le trouve dans sa fille. Elle va réaliser pour et par sa fille tout ce qu’elle a rêvé de réaliser pour et par elle-même. Avec quels soins, avec quelle ardeur va-t-elle cultiver le talent dont elle dirigera les manifestations ! Grâce à Delphine, elle garde le contact avec le faubourg Saint-Germain, où l’on aime entendre la jeune poétesse réciter ses vers. Elle attire chez elle les illustrations naissantes, c’est à-dire toutes les gloires du romantisme. Elle uti lise sa position antérieure, le nom qu’elle a déjà dans le monde des lettres, ses relations à l’Académie et dans les milieux les plus en vue de la capi-