Page:Malot - Cara, 1878.djvu/231

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-seulement était fils de bourgeois, mais qui de plus avait pour père un Normand et pour mère une femme de commerce, ce côté bourgeois se manifestait dans une certaine méfiance qui apparaissait chez lui aussitôt qu’il s’agissait d’une question d’argent ; c’est-à-dire, pour préciser en employant une expression bourgeoise, qu’il était volontiers porté à s’imaginer « qu’on voulait lui tirer des carottes ». Et comme dès son enfance, au collége, où il était arrivé avec de l’argent sonnant dans ses poches, il avait eu mainte fois à subir cette extraction désagréable, il avait pris des habitudes de réserve et de prudence qui faisaient qu’au premier mot d’argent qu’on lui disait il se mettait sur la défensive.

On comprend combien fut doux son soulagement quand, après son entretien avec Cara, il eut acquis la certitude que celle-ci ne lui avait pas envoyé Louise pour lui tirer cette fameuse carotte qu’il redoutait tant.

Elle était donc bien réellement la femme qu’il avait cru, et non pas celle qu’un sentiment d’injuste suspicion, qu’il se reprochait maintenant, lui avait fait supposer pendant quelques instants.

Ayant entre les mains les valeurs de Cara, il ne lui restait plus que deux choses à faire : savoir tout d’abord à combien se montaient les sommes que devait sa maîtresse, et ensuite se procurer l’argent nécessaire pour qu’elle pût elle-même payer ces sommes.

Profitant d’un jeudi, c’est-à-dire d’une absence de Cara, il s’adressa à Louise pour qu’elle lui donnât le montant de ces sommes : mais ce fut difficilement qu’il la décida à parler.

À mesure qu’elle lui énumérait les noms des créanciers, couturier, modiste, marchand de fourrages, mar-