Page:Malot - Cara, 1878.djvu/239

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ment vers le bureau de madame Haupois-Daguillon.

— Voici un billet de 10, 000 francs, dit-il ; faut-il le payer ?

À madame Haupois-Daguillon il ne fallut pas beaucoup de temps non plus pour reconnaître l’écriture de son fils ; mais la surprise fut si forte chez elle qu’elle resta un moment sans rien dire ; puis, se remettant peu à peu, elle tourna vers Savourdin un visage pâle, mais calme :

— Mon fils ne vous avait donc pas prévenu ? dit-elle.

— Non, madame, et voilà pourquoi je viens vous demander s’il faut payer.

— Vous demandez s’il faut payer un billet signé Haupois-Daguillon, vous ! Payez vite : c’est déjà trop de retard.

Et, comme il tournait vivement sur ses talons, elle l’arrêta d’un signe de la main :

— Je vous autorise à faire remarquer à mon fils qu’il doit vous prévenir des billets mis en circulation ; venant de vous cette observation lui fera mieux comprendre ce que son oubli a de regrettable.

Ce fut tout ; mais les employés qui dans la journée eurent affaire à « madame », comme on l’appelait dans la maison, furent reçus de telle façon qu’il fut évident pour tous qu’il se passait quelque chose de grave ; seulement, comme Savourdin se garda bien de parler du billet, on ne sut pas ce qui motivait cette humeur.

Madame Haupois-Daguillon ne quitta son bureau qu’à l’heure ordinaire pour aller dîner rue de Rivoli : elle trouva son mari installé dans la salle à manger, à sa place, et l’attendant tranquillement les deux coudes sur la table, lisant son journal étalé devant lui. Cette table était servie comme à l’ordinaire, c’est-à-dire avec