Page:Malot - Cara, 1878.djvu/303

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« Mon cher enfant, je suis malade au lit depuis six jours ; je suis seule à Paris, ton père étant retenu à Madrid ; je voudrais te voir ; toi, ne voudras-tu pas embrasser ta mère qui t’aime et que ton baiser guérira peut-être ? »

Il fallait avoir la certitude que cette lettre arriverait dans les mains de Léon, et pour cela il n’était pas prudent de la confier à la poste ; elle fit venir son vieux valet de chambre, en qui elle avait toute confiance, et elle lui dit d’aller se mettre en faction devant le n° 9 de la rue Auber.

— Quand mon fils sortira seul, vous lui donnerez cette lettre en lui disant que je suis malade ; s’il est accompagné, vous ne lui remettrez et ne lui direz rien ; vous attendrez.

Le vieux Jacques resta devant la porte de la rue Auber depuis midi jusqu’à cinq heures du soir et ce fut seulement à ce moment qu’il put remettre sa lettre à Léon qui rentrait seul.

Tout d’abord Léon, qui avait reconnu l’écriture de l’adresse, voulut repousser cette lettre, mais le vieux Jacques prononça alors les paroles que, depuis qu’il avait commencé sa faction, il se répétait machinalement :

— Madame, malade, m’a dit de remettre cette lettre à monsieur.

Vivement il ouvrit la lettre et, sans dire un seul mot, à pas rapides il se dirigea du côté de la rue de Rivoli.

Le temps de l’attente avait été terriblement long pour madame Haupois-Daguillon de deux heures à cinq ; enfin, un coup de sonnette retentit, qui la fit sauter sur son lit ; c’était lui ! elle ne se trompait pas, elle