Page:Malot - Cara, 1878.djvu/344

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Jusqu’alors elle avait parlé debout devant Léon en le tenant sous son regard ; mais, si cette position était bonne pour l’observer et le dominer, elle était mauvaise pour le toucher et dans un mouvement de trouble passionné lui faire perdre la tête.

Elle vint donc se placer près de lui sur le canapé où il était assis :

— Voilà dans quelles dispositions j’ai quitté Paris, dit-elle, décidée à t’obliger à la rupture ou au mariage, à la rupture si tu étais le complice de ta famille, ou au mariage si tu en étais la victime. Et ma résolution était si bien arrêtée que j’ai eu soin de prendre avec moi tous les papiers nécessaires à ce mariage : tes actes de naissance et de baptême, ainsi que les miens. Tu vas me dire que ce n’est pas en quelques minutes qu’on obtient ces actes. Cela est juste, et je ne veux pas qu’à cet égard il s’élève un doute dans ton esprit : j’avais ces actes depuis quelque temps déjà, bien avant que ton voyage fût décidé, les légalisations qui sont sur les actes de naissance en feront foi par leur date.

Pourquoi avait-elle levé ces actes bien avant que le voyage de Léon fût décidé ? Ce fut ce qu’elle n’expliqua pas ; il suffisait au succès de son plan que Léon ne pût pas croire qu’elle avait eu le temps de les obtenir entre le moment où Rouspineau avait parlé et celui où elle était partie, et la date de la légalisation était une réponse suffisante à cette question si Léon se la posait.

Elle continua :

— Pendant les premiers jours de la traversée, je m’affermis dans ma résolution : rupture ou mariage ; il n’y avait que cela de possible, il n’y avait que cela de digne.