Page:Malot - Cara, 1878.djvu/406

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une bouteille où se trouvait le café que Louise préparait à l’avance pour ses déjeuners, il lui en fit boire une grande tasse, et comme elle ne pouvait desserrer les dents, il les lui écarta avec une cuillère, de force, et il lui entonna le café dans la bouche. Puis, la prenant de nouveau dans son bras, il la fit marcher en long et en large à travers tout l’appartement ; quand elle s’abandonnait, il la relevait énergiquement.

Quelle différence entre ce second traitement et le premier ; entre les caresses de l’un et les bousculades de l’autre !

Cependant l’effet du second fut beaucoup plus rapide que ne l’avait été celui du premier : elle ne tarda pas à ouvrir les yeux et à prononcer quelques paroles sans suite. Puis elle voulut s’asseoir. Alors, à plusieurs reprises, elle passa ses deux mains sur son visage en regardant Léon, et tout à coup elle éclata en sanglots.

Il s’était assis devant elle ; il resta immobile, la regardant, attendant que cette crise nerveuse fût calmée avant de lui parler.

Ils demeurèrent ainsi en face l’un de l’autre pendant plus d’un quart d’heure, elle pleurant et sanglotant, lui réfléchissant ; ce fut elle qui la première rompit ce silence :

— Pourquoi n’as-tu pas voulu me laisser mourir ! s’écria-t-elle.

— Parce que tu ne voulais pas mourir.

— Si tu as cru cela, pourquoi m’as-tu secourue ?

— Parce que, n’y eût-il qu’une chance contre mille pour que ton suicide fût vrai, je devais te soigner.

— Brutalement ; mais comment m’étonner de cette brutalité chez un homme qui me trompe ? Tu viens de