Page:Malot - Cara, 1878.djvu/44

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— Enfin, fais le possible pour qu’il n’ait pas cette pensée, et fais le possible aussi pour le rassurer. Pour moi, c’est là ma grande préoccupation, et c’est pour qu’il ne s’inquiète pas que je ne l’accompagne pas toujours comme je le voudrais ; il me semble que quand il est seul, comme il ne peut pas douter de ma sollicitude ni de ma tendresse, il en arrive parfois à douter de la gravité de son mal, et à se faire illusion sur le danger qui le menace. Je voudrais tant lui rendre un peu de tranquillité !

Tandis qu’elle parlait, Léon regardait ce qui se passait sur la grève et remarquait un mouvement parmi les baigneurs qui n’existait pas lorsqu’il était arrivé avec Madeleine.

Des groupes s’étaient formés, çà et là, dans lesquels on paraissait s’entretenir avec animation : ceux qui parlaient gesticulaient avec de grands mouvements de bras, ceux qui écoutaient prenaient des attitudes affligées ou consternées.

En face de la cabine dans laquelle ils étaient assis, mais à une certaine distance sur la plage se trouvaient de grandes jeunes filles qui jouaient au croquet : bien qu’elles fussent trop éloignées pour qu’on entendît ce qu’elles disaient, il était évident, à leurs exclamations et à la façon dont elles accompagnaient, dont elles poussaient leur boule lancée de la tête, des épaules ou du maillet qu’elles apportaient un très-vif intérêt à leur partie. Tout à coup, une personne étant venue parler à l’une d’elles, toutes cessèrent instantanément de jouer et formèrent le cercle autour de la nouvelle arrivante ; et alors, ce que Léon avait déjà remarqué pour les groupes se reproduisit : même animation dans celle