Page:Malot - Cara, 1878.djvu/58

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— Je ne veux pas te distraire, continua Léon, et je ne te dirai que ce qui doit être dit.

— Descendons à la mer, je te prie.

— Si tu le veux, mais en tant que cela ne nous éloignera pas de Bernières, où je vais pour prévenir par dépêche mon père de ce qui est arrivé ; il faut que tu aies près de toi ceux qui t’aiment.

Mais la réponse de M. Haupois-Daguillon ne fut pas ce que Léon avait prévu : malade en ce moment, il ne pourrait pas quitter Balarue avant plusieurs jours, le médecin s’y opposait formellement, et madame Haupois-Daguillon restait près de lui pour le soigner. Ils étaient l’un et l’autre désolés de ne pouvoir pas accourir auprès de Madeleine à qui ils envoyaient l’assurance de leur tendresse et leur dévouement.

— C’est près de ton père que tu devrais être, dit Madeleine, lorsque Léon lui lut cette dépêche, pars donc, je t’en prie.

— Si mon père était en danger je partirais, mais cela n’est pas, ses douleurs se sont exaspérées sous l’influence des eaux, voilà tout ; mon devoir est de rester ici, j’y reste, et j’y resterai jusqu’au moment où nous pourrons partir ensemble.

Ce moment n’arriva pas aussi promptement que Léon l’espérait ; les jours s’écoulèrent et chaque matin, chaque soir les nouvelles qu’il reçut des gens postés le long de la côte furent toujours les mêmes : rien de nouveau.

Chaque jour, chaque heure qui s’écoulaient augmentaient l’angoisse de Madeleine : jamais plus elle ne verrait son père qui n’aurait pas une tombe sur laquelle elle pourrait venir pleurer.