temps éloignée de sa maison de commerce pour ne pas vouloir reprendre dès le soir même les habitudes de toute sa vie ; aussi, malgré les fatigues d’un voyage de vingt-deux heures, voulut-elle, après le dîner, aller coucher rue Royale.
— Je vais t’accompagner, lui dit son fils.
À peine dans la rue, Léon se pencha à l’oreille de sa mère :
— Comment trouves-tu Madeleine ? lui demanda-t-il.
L’intonation de cette question était si douce, que madame Haupois-Daguillon s’arrêta surprise et, s’appuyant sur le bras de son fils, elle força celui-ci à la regarder en face :
— Pourquoi me demandes-tu cela ? lui dit-elle.
— Mais pour savoir ce que tu penses maintenant de Madeleine, que tu n’avais pas vue depuis deux ans.
— Et pourquoi tiens-tu tant à savoir ce que je pense de Madeleine ?
— Pour une raison que je te dirai quand tu auras bien voulu me répondre.
Ces quelques paroles s’étaient échangées rapidement ; la voix du fils était émue ; celle de la mère était inquiète.
Cependant tous deux avaient pris le ton de l’enjouement.
— Sur quoi porte ta question ? demanda madame Haupois-Daguillon, qui paraissait vouloir gagner du temps et peser sa réponse avant de la risquer.
— Comment sur quoi ? Mais sur Madeleine, puisque c’est d’elle que je te parle.
— J’entends bien, mais toi aussi tu m’entends bien ; tu me demandes comment je trouve Madeleine ; est-ce