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EN FAMILLE.

à l’attention par une vérandah vitrée à laquelle on arrivait par un perron à double révolution.

Quand elles entrèrent sous cette vérandah, elles furent reçues par Talouel qui se promenait en long et en large comme un capitaine sur sa passerelle, les mains dans ses poches, son chapeau sur la tête.

Il paraissait furieux :

« Qu’est-ce qu’elle a encore celle-là ? » cria-t-il.

Rosalie montra sa main ensanglantée.

« Enveloppe-la donc de ton mouchoir, ta patte ! » cria-t-il.

Pendant qu’elle tirait difficilement son mouchoir, il arpentait la vérandah à grands pas ; quand elle l’eut tortillé autour de sa main, il revint se camper devant elle :

« Vide ta poche. »

Elle le regarda sans comprendre.

« Je te dis de tirer tout ce qui se trouve dans ta poche. »

Elle fit ce qu’il commandait et tira de sa poche un attirail de choses bizarres : un sifflet fait dans une noisette, des osselets, un dé, un morceau de jus de réglisse, trois sous et un petit miroir en zinc.

Il le saisit aussitôt :

« J’en étais sûr, s’écria-t-il, pendant que tu te regardais dans ton miroir un fil aura cassé, ta cannette s’est arrêtée, tu as voulu rattraper le temps perdu, et voilà.

— Je me suis pas regardée dans ma glace, dit-elle.

— Vous êtes toutes les mêmes ; avec ça que je ne vous connais pas. Et maintenant qu’est-ce que tu as ?

— Je ne sais pas ; les doigts écrasés.

— Qu’est-ce que tu veux que j’y fasse ?