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Page:Malot - En famille, 1893.djvu/409

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EN FAMILLE.

— Je voudrais vous prouver chaque jour, pour tout, dans tout, ce qu’il y a de reconnaissance dans mon cœur,… et aussi d’autres sentiments respectueux que je n’ose exprimer.

— Puisqu’il en est ainsi, le mieux est peut-être, en effet, que tu n’écrives pas, au moins pour le moment ; nous verrons plus tard. Mais afin que tu puisses m’être utile, il faut que tu travailles, et te mettes en état de me servir de secrétaire pour beaucoup d’affaires, dans lesquelles tu dois écrire convenablement, puisque tu écris en mon nom. D’autre part il est convenable aussi pour toi, il est bon que tu t’instruises. Le veux-tu ?

— Je suis prête à tout ce que vous voudrez, et je vous assure que je n’ai pas peur de travailler.

— S’il en est ainsi, les choses peuvent s’arranger sans que je me prive de tes services. Nous avons ici une excellente institutrice, en rentrant je lui demanderai de te donner des leçons quand sa classe est finie, de six à huit heures, au moment où je n’ai plus besoin de toi. C’est une très bonne personne qui n’a que deux défauts : sa taille, elle est plus grande que moi, et plus large d’épaules, — plus massive bien qu’elle n’ait pas quarante ans, — et son nom, Mlle Belhomme, qui crie d’une façon fâcheuse, ce qu’elle est réellement : un bel homme sans barbe, et encore n’est-il pas certain qu’on ne lui en trouverait point en regardant bien. Pourvue d’une instruction supérieure, elle a commencé par des éducations particulières, mais sa prestance d’ogre faisait peur aux petites filles, tandis que son nom faisait rire les mamans et les grandes sœurs. Alors elle a renoncé au monde des villes, et bravement elle est entrée dans l’instruction primaire