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SANS FAMILLE

aussi beaux que ceux de Dolce. Ce fut alors que j’appris à connaître les Albert, les Huntley et autres pâtisseries sèches, dont avant de sortir ils avaient soin de bourrer leurs poches, pour les distribuer ensuite généreusement entre Joli-Cœur, les chiens et moi.

Quand le printemps s’annonça par de chaudes journées, notre public commença à devenir moins nombreux, et, après la représentation, plus d’une fois des enfants vinrent donner des poignées de main à Joli-Cœur et à Capi. C’étaient leurs adieux qu’ils faisaient ; le lendemain nous ne devions plus les revoir.

Bientôt nous nous trouvâmes seuls sur les places publiques, et il fallut songer à abandonner, nous aussi, les promenades de la Basse-Plante et du Parc.

Un matin nous nous mîmes en route, et nous ne tardâmes pas à perdre de vue les tours de Gaston Phœbus et de Montauset.

Nous avions repris notre vie errante, à l’aventure, par les grands chemins.

Pendant longtemps, je ne sais combien de jours, combien de semaines, nous allâmes devant nous, suivant des vallées, escaladant des collines, laissant toujours à notre droite les cimes bleuâtres des Pyrénées, semblables à des entassements de nuages.

Puis, un soir, nous arrivâmes dans une grande ville, située au bord d’une rivière, au milieu d’une plaine fertile : les maisons, fort laides pour la plupart, étaient construites en briques rouges ; les rues étaient pavées de petits cailloux pointus, durs aux pieds des voyageurs qui avaient fait une dizaine de lieues dans leur journée.