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SANS FAMILLE

maître avec attention, que je retrouvais en lui, dans sa tenue, dans son air, dans ses manières, des points de ressemblance avec la tenue, l’air et les manières de madame Milligan.

Alors je me disais que cela était impossible, parce que mon maître n’était qu’un montreur de bêtes, tandis que madame Milligan était une dame.

Mais ce que me disait la réflexion n’imposait pas silence à ce que mes yeux me répétaient ; quand Vitalis le voulait, il était un monsieur tout comme madame Milligan était une dame ; la seule différence qu’il y eût entre eux tenait à ce que madame Milligan était toujours dame, tandis que mon maître n’était monsieur que dans certaines circonstances ; mais alors il l’était si complètement, qu’il en eût imposé aux plus hardis comme aux plus insolents.

Or, comme je n’étais ni hardi, ni insolent, je subissais cette influence et je n’osais pas m’abandonner à mes épanchements alors même qu’il les provoquait par quelques bonnes paroles.

Après être partis de Cette, nous étions restés plusieurs jours sans parler de madame Milligan et de mon séjour sur le Cygne, mais peu à peu ce sujet s’était présenté dans nos entretiens, mon maître l’abordant toujours le premier, et bientôt il ne s’était guère passé de jours sans que le nom de madame Milligan fût prononcé.

— Tu l’aimais bien, cette dame ? me disait Vitalis, oui ; je comprends cela ; elle a été bonne, très-bonne pour toi ; il ne faut penser à elle qu’avec reconnaissance.