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SANS FAMILLE

— Maman ! maman !

Mais ma voix ne pouvait ni descendre, ni dominer le murmure du ruisseau, elle se perdit dans l’air.

— Qu’as-tu donc, demanda Vitalis, deviens-tu fou ?

Sans répondre, je restai les yeux attachés sur mère Barberin ; mais elle ne me savait pas si près d’elle et elle ne pensa pas à lever la tête.

Elle avait traversé la cour, et revenue sur le chemin, elle regardait de tous côtés.

Je criai plus fort, mais comme la première fois, inutilement.

Alors Vitalis, soupçonnant la vérité, monta aussi sur le parapet.

Il ne lui fallut pas longtemps pour apercevoir la coiffe blanche.

— Pauvre petit, dit-il à demi-voix.

— Oh ! je vous en prie, m’écriai-je encouragé par ces mots de compassion, laissez-moi retourner.

Mais il me prit par le poignet et me fit descendre sur la route.

— Puisque tu es reposé, dit-il, en marche, mon garçon.

Je voulus me dégager, mais il me tenait solidement.

— Capi, dit-il, Zerbino !

Et les deux chiens m’entourèrent : Capi derrière, Zerbino devant.

Il fallut suivre Vitalis.

Au bout de quelques pas, je tournai la tête.

Nous avions dépassé la crête de la montagne, et je