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Page:Malot - Sans famille, 1887, tome 1.djvu/92

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SANS FAMILLE

après avoir marché assez longtemps en réfléchissant.

— C’est difficile pour ceux qui ont la tête dure, et plus difficile encore pour ceux qui ont mauvaise volonté. As-tu la tête dure ?

— Je ne sais pas ; mais il me semble que si vous vouliez m’apprendre à lire, je n’aurais pas mauvaise volonté.

— Eh bien, nous verrons ; nous avons du temps devant nous.

Du temps devant nous ! Pourquoi ne pas commencer aussitôt ? Je ne savais pas combien il est difficile d’apprendre à lire et je m’imaginais que tout de suite j’allais ouvrir un livre et voir ce qu’il y avait dedans.

Le lendemain, comme nous cheminions, je vis mon maître se baisser et ramasser sur la route un bout de planche à moitié recouvert par la poussière.

— Voilà le livre dans lequel tu vas apprendre à lire, me dit-il.

Un livre, cette planche ! Je le regardai pour voir s’il ne se moquait pas de moi. Puis comme je le trouvai sérieux, je regardai attentivement sa trouvaille.

C’était bien une planche, rien qu’une planche de bois de hêtre, longue comme le bras, large comme les deux mains, bien polie ; il ne se trouvait dessus aucune inscription, aucun dessin.

Comment lire sur cette planche, et quoi lire ?

— Ton esprit travaille, me dit Vitalis en riant.

— Vous voulez vous moquer de moi ?

— Jamais, mon garçon ; la moquerie peut avoir du bon pour réformer un caractère vicieux, mais lorsqu’elle s’adresse à l’ignorance, elle est une marque de