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Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/106

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tiens encore debout c’est soutenu par la pensée que si nous nous asseyons nous ne nous relèverons pas et mourrons là de froid. Allons !

Je le suivis.

– Le chemin a-t-il des ornières profondes ?

– Il n’en a pas du tout.

– Il faut retourner sur nos pas.

Le vent qui nous soufflait dans le dos, nous frappa à la face et si rudement, qu’il me suffoqua : j’eus la sensation d’une brûlure.

Nous n’avancions pas bien rapidement en venant, mais en retournant nous marchâmes plus lentement encore.

– Quand tu verras des ornières, préviens-moi, dit Vitalis ; le bon chemin doit être à gauche, avec une tête d’épine au carrefour.

Pendant un quart d’heure, nous avançâmes ainsi luttant contre le vent ; dans le silence morne de la nuit, le bruit de nos pas résonnait sur la terre durcie ; bien que pouvant à peine mettre une jambe devant l’autre, c’était moi maintenant qui traînais Vitalis. Avec quelle anxiété je sondais le côté gauche de la route !

Une petite étoile rouge brilla tout à coup dans l’ombre.

– Une lumière, dis-je en étendant la main.

– Où cela ?

Vitalis regarda, mais bien que la lumière scintillât à une distance qui ne devait pas être très grande, il ne vit rien. Par là je compris que sa vue était affaiblie,