Page:Malot - Sans famille, 1902.djvu/125

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– Je vous remercie, dit Mattia, pas aujourd’hui, quand je repasserai.

J’étais ébahi de l’assurance de Mattia ; il me lança un coup d’œil à la dérobée pour me dire d’attendre un moment avant de me fâcher.

Bientôt Espinassous eut fini de raser son paysan, et, la serviette à la main, il vint pour couper les cheveux de Mattia.

– Monsieur, dit Mattia, pendant qu’on lui nouait la serviette autour du cou, nous avons une discussion, mon camarade et moi, et comme nous savons que vous êtes un célèbre musicien, nous pensons que vous voudrez bien nous donner votre avis sur ce qui nous embarrasse.

– Dites un peu ce qui vous embarrasse, jeunes gens.

Je compris où Mattia tendait à arriver : d’abord il voulait voir si ce perruquier-musicien était capable de répondre à ses questions, puis au cas où ses réponses seraient satisfaisantes, il voulait se faire donner sa leçon de musique pour le prix d’une coupe de cheveux ; décidément il était malin, Mattia.

– Pourquoi, demanda Mattia, accorde-t on un violon sur certaines notes et pas sur d’autres ?

Je crus que ce perruquier, qui précisément à ce moment même était en train de passer le peigne dans la longue chevelure de Mattia, allait faire une réponse dans le genre des miennes, et je riais déjà tout bas quand il prit la parole :

– La seconde corde à gauche de l’instrument