vas donner à manger à un homme qui a dix lieues dans les jambes.
– C’est que je n’ai rien : nous ne t’attendions pas.
– Comment rien ; rien à souper ?
Il regarda autour de lui.
– Voilà du beurre.
Il leva les yeux au plafond à l’endroit où l’on accrochait le lard autrefois ; mais depuis longtemps le crochet était vide ; et à la poutre pendaient seulement maintenant quelques glanes d’ail et d’oignons.
– Voilà de l’oignon, dit-il, en faisant tomber une glane avec son bâton ; quatre ou cinq oignons, un morceau de beurre et nous aurons une bonne soupe. Retire ta crêpe et fricasse-nous les oignons dans la poêle.
La soupe fut faite. Mère Barberin la servit dans les assiettes.
Alors quittant le coin de la cheminée il vint s’asseoir à table et commença à manger, s’arrêtant seulement de temps en temps pour me regarder.
J’étais si troublé, si inquiet, que je ne pouvais manger, et je le regardais aussi, mais à la dérobée, baissant les yeux quand je rencontrais les siens.
– Est-ce qu’il ne mange pas plus que ça d’ordinaire ? dit-il tout à coup en tendant vers moi sa cuiller.
– Ah ! si, il mange bien.
– Tant pis ; si encore il ne mangeait pas.
Naturellement je n’avais pas envie de parler, et mère Barberin n’était pas plus que moi disposée à la