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Page:Malte-Brun - la France illustrée tome I.djvu/221

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AISNE

il fut réuni à la couronne et donné au prince Charles de Valois vers 1350 ; en 1393, il échut à Louis de France, frère de Philippe le Bel, puis en 1400 il fut donné par Charles VI à son frère le duc d’Orléans, qui fit reconstruire le château en même temps qu’il faisait réparer celui de Pierrefonds. Cette importance nouvelle fut pour La Ferté un présent funeste ; elle fut plusieurs fois assiégée et ne rentra sous l’autorité royale qu’en 1429, grâce au dévouement des habitants qui chassèrent la garnison anglaise ; plus tard, elle tomba au pouvoir des ligueurs ; en 1588, n’échappa aux désastres de la guerre religieuse, en s’engageant à une neutralité absolue, que pour devenir la proie d’une troupe de bandits qui, après avoir pénétré par surprise dans ses murs, s’y laissèrent surprendre à leur tour et furent passés au fil de l’épée. Enfin, Henri IV, en 1594, s’en rendit maître par composition, et, éclairé par l’expérience du passé, il fit démanteler la forteresse par les habitants de vingt-huit communes environnantes, qui consacrèrent huit jours à cette démolition. Racine naquit à La Ferté-Milon le 22 décembre 1639, et on voit sur le pont de l’Ourcq une statue du grand tragique, due à David d’Angers. La ville possède une bibliothèque publique et deux églises, Notre-Dame et Saint-Nicolas.

Les armes de La Ferté-Milon sont : d’azur, à un château de deux tours d’argent, ouvert, ajouré et maçonné de sable.



Fère-en-Tardenois. — Fère-en-Tardenois (Fara in Tardenia), chef-lieu de canton, peuplé de 2,367 habitants, situé sur l’Ourcq, à 20 kilomètres au nord de Château-Thierry, est une petite ville fort ancienne, dont la seigneurie fut possédée par les comtes de Dreux. Elle n’a pour toute histoire que celle de ses malheurs, prise et reprise qu’elle fut par les ligueurs et les calvinistes (1589 et 1590), ou bien encore pillée par les Espagnols (1652). Elle fait un certain commerce de grains, de vins, de laines, de bois et de chevaux et possède une fonderie, des fabriques de lainages, de poteries et de sabots.

Son château, situé à quelque distance de la ville sur une éminence octogonale, mérite d’être visité ; il fut construit en 1206 par Robert, comte de Dreux, un de ses premiers seigneurs. Il était composé de huit tours d’environ 20 mètres d’élévation ; une enceinte inférieure formant terrasse et fortifiée elle-même de tours et de courtines l’entourait ; un pont-levis le faisait communiquer avec une avancée également fortifiée ; en 1539, ce pont-levis fut remplacé, par les ordres d’Anne de Montmorency, par une belle galerie à portail ionique, de 60 mètres d’élévation sur une longueur de 55 mètres, qui franchit le fossé sur cinq arches. Ce château est rangé parmi nos monuments historiques.

Dans les environs, M. F. Moreau a découvert autour d’un dolmen de curieuses antiquités préhistoriques.



Saint-Quentin (lat. 49° 50’ 55" ; long. 0° 57’ 13). — Saint-Quentin (Augusta Veromanduorum, Quintinopolis), importante station de la ligne de Paris à Bruxelles, à 50 kilomètres nord-ouest de Laon, chef-lieu d’arrondissement, peuplé de 38,924 habitants, siège d’une chambre consultative des arts et manufactures, d’un conseil de prud’hommes, d’une société académique des arts, sciences et agriculture, de tribunaux de première instance et de commerce, avec lycée et école de commerce, était autrefois chef-lieu d’élection, bailliage, prévôté royale, maîtrise particulière, gouvernement particulier, capitale de la petite province de Vermandois, relevant du diocèse de Noyon, du parlement de Paris et de l’intendance d’Amiens.

La très ancienne origine de cette ville est attestée par les documents les plus authentiques ; elle est citée par Ptolémée, elle figure dans l’Itinéraire d’Antonin et dans la Table de Peutinger ; elle échangea son nom romain en l’honneur de saint Quentin, un des premiers apôtres du christianisme qui souffrit le martyre dans ses murs en 303, dans la persécution qui ensanglanta le règne de Dioclétien et de Maximien ; elle n’échappa à aucune des crises qui signalèrent la dissolution de l’empire ; prise et brûlée par les Vandales en 407, par Attila en 451, elle fut ravagée plus cruellement encore par les Normands au VIIe siècle et en 883. Elle ne retrouva de sécurité que sous le règne de Charlemagne, qui avait une profonde vénération pour la sainteté de son église et qui l’enrichit de ses libéralités. Les guerres féodales troublèrent vite cette ère de paix et de prospérité. Hugues de France s’empara de Saint-Quentin en 932, après un siège de deux mois. L’ancien possesseur, Herbert II, appela les Lorrains à son aide et reprit la ville, dont les fortifications furent détruites. Vers 1102, une charte communale fut octroyée aux habitants de Saint-Quentin par Raoul, comte de Vermandois ; Philippe le Long l’abolit sans qu’on en connaisse