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Page:Malte-Brun - la France illustrée tome I.djvu/9

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LA FRANCE ILLUSTRÉE

monuments, les villes, les provinces se faisaient jour. Les Sauval, les Bouillart, les Sainte-Marthe, les Vaissette, les Félibien, les Lobineau, les Lebeuf, les Saint-Foix, les Saint-Victor, etc., etc., publiaient à l’envi ces grands travaux, qui ont depuis servi de base à tant d’ouvrages et de compilations. Boucher d’Argis écrivait avec l’abbé Lebeuf, dans le Mercure de France, ces savantes dissertations historiques que nous regrettons de voir encore éparses dans les cahiers de plus en plus rares de ce recueil, et peut-être bientôt perdues pour nous ; l’abbé Expilly entreprenait son Grand Dictionnaire, qu’il devait malheureusement laisser inachevé ; le grand mouvement historique était commencé. Alors grandissaient ceux qui allaient être les maîtres des Daunou, des Letronne et des Michelet.

Toutefois, la science historique et descriptive dut, tout d’abord, prendre les allures de l’époque ; il fallut cacher sous le charme d’une légère description les sérieuses observations que l’on voulait consigner dans ses ouvrages. C’est ce qui fit la fortune littéraire de ce genre de voyages légers et badins dont Chapelle et Bachaumont, puis après eux Boufflers, Piron, Racine, Voltaire et Bernardin de Saint-Pierre lui-même ont laissé des modèles. Ce goût devait s’épurer, et déjà, au moment de la Révolution, un grand changement s’était opéré. On revenait, tout en conservant cette forme aimée de voyages, aux descriptions plus sérieuses, comme on peut s’en convaincre en consultant le Voyage dans les départements de la France de Joseph Lavallée, dont le style est aujourd’hui inabordable à cause du patriotisme beaucoup trop exalté de l’auteur, et en parcourant surtout les douze volumes in-douze que l’abbé de La Porte ou, pour mieux préciser, son continuateur, le R. P. de Fontenay, consacre à la France, dans le volumineux ouvrage du Voyageur français.

Cependant, la nouvelle division de la France en départements, que La Mésengère fut le premier à faire connaître dans son ouvrage, les nombreux et rapides changements survenus en moins d’un quart de siècle dans notre pays, laissaient bien loin en arrière toute description du pays, lorsque Peuchet et Chanlaire, secondés par Letronne, entreprirent leur belle Description topographique et statistique de la France ; cet ouvrage, malheureusement, ne fut pas achevé, et c’est là le sort qui a été commun depuis à plus d’une tentative de ce genre ; cinquante-trois départements, dont douze ne sont plus français, furent seulement publiés ; mais, malgré cette lacune regrettable, c’est encore une œuvre remarquable, bien comprise, bien conçue, et que n’ont pas manqué de consulter ceux qui depuis ont écrit sur la matière.

Sous la Restauration, tandis que le savant et modeste Depping revoyait et publiait la Géographie de la France de l’académicien Edme Mentelle, M. Vaysse de Villiers donnait ses Itinéraires descriptifs, historiques et pittoresques, dont l’ensemble devait former une géographie complète de la France ; ces itinéraires eurent un grand succès, bien dépassé depuis par celui des ouvrages d’Adolphe Joanne ; mais la mort vint surprendre leur auteur avant qu’il eût terminé son travail. Quelques années plus tard, M. Girault de Saint-Fargeau reprenait cette idée et la réalisait avec bonheur dans son Guide pittoresque du voyageur en France, édité avec un grand luxe de gravures par Firmin Didot. — Au même moment, en 1835, M. Abel Hugo donnait son estimable