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la brèche aux buffles.

tivement peuplées du pied des Black-Hills, ils se sont montrés beaucoup moins pressés ; ils ont attendu de pied ferme les propositions des villes qui aspiraient, pour employer l’expression locale, à devenir le robinet (the tap) des Black-Hills. C’est Rapid-City, ou du moins un syndicat qui avait acheté sous main tous les terrains disponibles des environs, qui a misé le plus haut dans ces enchères, et Rapid-City, tête de ligne au moins provisoire du chemin de fer, absorbant tout le trafic des Black-Hills, a joui bientôt d’une prospérité extraordinaire.

Comme toutes les personnes auxquelles la fortune prodigue trop vite ses faveurs, la jeune City s’est laissé un peu griser. À certains moments, des lots de la première avenue sont montés à un chiffre qui n’eût pas fait mauvaise figure un jour de vente à la Chambre des notaires à Paris, sauf à être à peu près invendables quelques semaines plus tard. Un spéculateur audacieux a même fondé une compagnie de tramways. Cette compagnie débuta modestement, car elle ne disposait que d’une voiture, d’un cheval et d’un conducteur. Pour utiliser tout cela, on avait construit une ligne qui commençait à la gare, longeait la première avenue !!! et allait se perdre dans la Prairie. Le service fut inauguré l’année dernière, pendant mon séjour. Cet événement produisit une vive émotion. Le conducteur faisait trois ou quatre voyages le matin, puis il allait déjeuner et recommençait le soir. Le service n’était donc pas très régulier, mais l’apparition du car blanc chatouillait délicieusement le patriotisme local ; aussi, dès que sa clochette se faisait entendre, bars et boutiques se vidaient et chacun s’empressait de monter sur la plate-forme pour se faire traîner pendant quelques