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Page:Mandat-Grancey La brèche aux buffles - 1889.djvu/272

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la brèche aux buffles.

grande famille clay. Raymond est très pressé de les marquer, car il a peur que quelqu’un d’eux ne s’égare ou soit volé. On a passé toute la matinée à dégager les corrals de la neige qui les encombre, opération qui a été singulièrement facilitée par le dégel, qui s’est établi tout d’un coup. À cinq heures, ce matin, le thermomètre marquait −18 °, à midi il en marque +12 ; il fait un soleil splendide, et de tous les côtés de petits ruisseaux descendant des collines s’acheminent vers le creek.

Après le déjeuner, je monte à cheval pour accompagner Raymond et deux hommes qui vont chercher le troupeau. Nous le trouvons à deux milles du ranch, dans le fond de la vallée. C’est le gars Sosthène qui est de garde, monté sur un poney blanc si petit que ses pieds traînent presque dans la neige. Les chevaux sont en train de manger. Comme je suis moi-même à cheval, ils me laissent approcher sans se déranger, et je peux tout à mon aise les voir opérer. La nourriture qu’ils recherchent de préférence, dès qu’il fait froid, c’est le buffalo grass, une petite herbe toute courte qui, de loin, ressemble à de la mousse et pousse par larges plaques. C’est évidemment leur odorat qui les guide, car on les voit chercher, le nez à terre, puis ils grattent la neige avec le pied, et quand la pointe de l’herbe apparaît, ils achèvent de la dégager avec les lèvres. De malheureuses bêtes qui sont obligées de faire tout ce travail pour se procurer à manger devraient n’avoir que la peau et les os. Elles sont cependant dans un état superbe : leur poil, heureusement déjà long, est luisant comme si elles étaient pansées.

Elles se laissent réunir par les boys sans trop de difficulté, puis on les pousse lentement dans la direction du corral. J’ai déjà décrit ces grandes enceintes