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XXV
SUR LA PHILOSOPHIE D'ÉPICTÈTE.

devant la nature et consent à ses lois nécessaires ; il est impuissant sur elle, et s’y résigne ; il réserve toute son action pour l’âme, pour la raison, à laquelle seule il s’attache en autrui.

Cette raison, objet de notre amour, nous avons le devoir de l’éclairer et de l’instruire ; de là un autre côté original de la doctrine stoïcienne : l’amitié stoïque est ardente au prosélytisme. « L’amitié, dit Épictète, se trouve là où sont la foi, la pudeur, le don du beau et du bien, δόσις τοῦ καλοῦ[1] » « Si tu veux vivre sans trouble et avec bonheur, tâche que tous ceux qui habitent avec toi soient bons ; et ils seront bons, si tu instruis ceux qui y consentent, si tu renvoies ceux qui n’y consentent pas[2]. » Quelqu’un dit à Épictète dans les Entretiens : « Ma mère pleure lorsque je la quitte. » Épictète lui répond : « Pourquoi n’est-elle pas instruite dans nos principes ? » « La seule chose, s’il y en a une, dira Marc-Aurèle, la seule chose qui pourrait nous faire revenir et nous retenir dans la vie, c’est s’il nous était accordé de vivre avec des hommes attachés aux mêmes maximes que nous[3]. » Ailleurs Marc-Aurèle, qui a déjà comparé l’âme

  1. Entretiens, II, xxii.
  2. Stob. Flor., i, 57.
  3. Pensées. IX, iii.